Michel Gurfinkiel

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USA/ Le jeu de l'oie

Pour un observateur étranger, les primaires américaines ont quelque chose de déroutant. Mais elles rendent bien compte de l’évolution de l’opinion.

Le 44e président des Etats-Unis sera élu le 4 novembre prochain. Ayant effectué deux mandats,  le président sortant républicain, George W. Bush, n’est pas rééligible. En général, c’est le vice-président qui se présente dans ce cas pour assurer la continuité politique. Mais Dick Cheney, le partenaire de Bush, âgé, malade et peu populaire, a décidé de passer la main. Le scrutin opposera donc, pour la première fois depuis 1952, des personnalités nouvelles des deux partis. Une situation « ouverte », c’est à dire imprévisible.

Les démocrates et les républicains désignent leurs candidats respectifs à la présidence et à la vice-présidence, le ticket , à la suite d'un premier processus électoral, les primaires. C’est un processus assez déroutant pour un observateur étranger. Il lui semble sortir de la logique euclidienne ou newtonienne pour entrer dans celle du Jeu de l'Oie. Ou d'Alice aux pays des merveilles…

Les citoyens qui veulent participer aux primaires, de janvier à juin selon les Etats, doivent se faire « enregistrer » sur les listes électorales locales en qualité de démocrates ou de républicains. Cela n'entache en rien leur liberté de choix au moment de l'élection présidentielle proprement dite, en novembre. Un « démocrate enregistré » peut parfaitement voter républicain, et vice-versa. Rien n'empêche non plus  un citoyen de se faire « enregistrer » à chaque campagne électorale pour un parti différent – ni à un homme politique de changer d'affiliation en cours de carrière. Dans plusieurs Etats, il n'y a même pas d'enregistrement : c'est l'ensemble des électeurs, démocrates et républicains, qui est appelé à se prononcer sur les candidats des deux partis. Transposée en France, cette situation permettrait par exemple aux sympathisants socialistes ou Front national d'arbitrer entre les candidats UMP ou MoDem.

Quelques Etats pratiquent les primaires sont leur forme la plus archaïque  : le caucus.  Les électeurs de chaque parti se rassemblent dans les mairies, les églises, voire même au domicile de riches particuliers. A l'heure dite – sept heures du soir en Iowa – on présente aux personnes ainsi réunies les candidats à la présidence. Leurs partisans respectifs se séparent en plusieurs groupes. On compte les têtes. On additionne les résultats des diverses réunions. Enfin, une quinzaine d'Etats, sur un total de cinquante, n'ont pas jugé bon de s'immiscer dans le fonctionnement des organisations politiques : il n'y a donc chez eux ni primaires, ni caucus. Ce sont les comités locaux des partis qui se prononcent.

Pour bizarre qu’il soit, le système fonctionne assez bien : en fin de parcours, les deux candidats sont représentatifs de l’Amérique réelle. Que dire des prétendants de 2008 ?

Chez les démocrates, le duel qui oppose Hillary Clinton, épouse de l’ex-président Bill Clinton et sénatrice de New-York, à Barack Obama, sénateur de l’Illinois, est un instantané de l’évolution démographique des Etats-Unis. Une Blanche de soixante ans, un Noir de quarante-sept ans. Une modérée qui a voté en faveur de la guerre d’Irak en 2003 et qui se refuse à un retrait précipité de ce pays. Un gauchiste qui a voté contre cet engagement militaire et qui en est devenu l’un des critiques les plus acerbes. Un électorat qui pourrait en supplanter un autre.

Chez les républicains, deux favoris âgés mais projetant une image de force, le sénateur de l’Arizona John MacCain, héros du Vietnam, et John Giuliani, ancien maire de New York, héros de la lutte contre la criminalité puis du 11 septembre 2001. L’un et l’autre passent pour être plus centristes que George W. Bush, ce qui pourrait constituer un atout. Il y aussi un outsider, Mike Huckabee, ancien gouverneur de l’Arkansas et pasteur baptiste, qui fait campagne à la fois sur les valeurs traditionnelles et la justice sociale.

Quand il ne siégeait pas encore au Sénat, Obama a souvent participé à des meetings propalestiniens. Hillary Clinton est pro-israélienne mais dans l’esprit des accords d’Oslo. Giuliani et MacCain sont nettement pro-israéliens. Quant à Huckabee, il s’est prononcé pour la création d’un Etat palestinien… en Egypte ou en Arabie Saoudite.

© Michel Gurfinkiel, 2008

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