Michel Gurfinkiel

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Michel Gurfinkiel

Dhimmitude/ Battus, cocus et contents

 

 

""Louis Massignon, apôtre du syncrétisme islamo-chrétien. Une rue portait son nom à Soukh-Arras, en Algérie. Elle a été débaptisée en 2009.

 

 

De Ground Zero à la Bretagne, l’étrange masochisme des « islamo-chrétiens ».

 

Une mosquée près de Ground Zero, l’emplacement où se dressaient jadis, à Manhattan, les tours jumelles du World Trade Center ? 70 % des Américains s’opposent à ce projet, patronné par l’organisation islamique Cordoba Initiative. La liberté de culte est sans doute l’un des principes fondamentaux de leur vie politique. Mais ils ne pensent pas que la religion au nom de laquelle, le 11 septembre 2001, les deux tours furent anéanties et trois mille personnes assassinées, puisse en bénéficier en ce lieu précis.

 

La personnalité du fondateur de Cordoba Initiative, Feisal Abdul Rauf, ne fait que renforcer leurs préventions. Admirateur de la République islamique d’Iran, ce dernier a laissé entendre dans un sermon que les attentats de 2001 ont pu être perpétrés par des non-musulmans. Il affirme qu’Oussama bin Laden a été « fabriqué aux Etats-Unis » (« made in the USA »). Il milite pour une islamisation progressive des pays occidentaux, acquis jusqu’ici à la culture judéo-chrétienne. Notamment par « l’intégration de la charia dans le droit occidental ». D’où le nom de son organisation : « Cordoba », c’est à dire « Cordoue », renvoie à la « coexistence pacifique » de l’islam, du christianisme et du judaïsme, sous suzeraineté musulmane, qui aurait existé en Espagne au Moyen-Age. Un modèle qui, historiquement, relève du mythe. Mais que les islamistes contemporains prétendent néanmoins appliquer à la civilisation mondiale du XXIe siècle.

 

Les quelque  30 % d’Américains qui soutiennent le projet de mosquée à Ground Zero ne sont pas moins informés que les autres des desseins d’Abdul Rauf et de Cordoba Initiative. Mais au lieu de s’en inquiéter, ils y adhérent.

 

Chez les uns, par réflexe communautaire. L’un des intellectuels musulmans américains les plus en vue, le journaliste Farid Zakaria, d’origine indienne, avait reçu, naguère, un prix de l’Anti-Defamation League (ADL), une organisation antiraciste juive. Il le lui a retourné quand celle-ci s’est opposée au projet de mosquée.

 

Le président Barack Obama, qui a été élevé dans la religion musulmane en Indonésie avant de se convertir à un culte noir chrétien, et qui a multiplié, au début de son administration, les gestes d’ « ouverture » à l’égard de l’islam, n’est pas moins favorable à l’édification de la mosquée. Il y est revenu hier de façon provocatrice, à Ground Zero même, lors des cérémonies qui marquaient le neuvième anniversaire des attentats. Selon lui, la leçon que les Américains doivent tirer du 11 septembre est « de défendre les droits de tous les Américains, y compris le droit pour chacun de prier comme cela lui plait ».

 

Cette attitude est d’autant plus remarquable que rien ne le contraint, en tant que président, à intervenir dans le débat. Et qu’il fait courir au parti démocrate, en l’adoptant, des risques supplémentaires aux élections dites de la « mi-mandat », qui auront lieu en novembre prochain. Détail curieux, relevé par le journaliste d’investigation Aaron Klein : Obama semble s’être largement inspiré des écrits de Feisal Abdul Rauf pour écrire – ou faire écrire – son discours le plus engagé en faveur de l’islam, prononcé au Caire le 4 juin 2009.

 

Chez d’autres Américains favorables au projet de mosquée (notamment la municipalité démocrate de New York), ce sont des motivations idéologiques qui entrent en jeu : affirmation du caractère absolu des droits de l’homme, parti pris en faveur des minorités, mais aussi tiers-mondisme, condamnation de « l’impérialisme » américain, solidarité systématique avec les opprimés, ou ceux qui passent pour tels, islamophilie non moins systématique.

 

Ces attitudes n’ont rien de nouveau. Ni en Amérique, ni ailleurs. Je m’en suis rappelé en me promenant voici quelques jours aux Sept Saints, un village des Côtes d’Armor. Depuis 1954, un pèlerinage commun islamo-chrétien s’y déroule chaque année : une pratique fondée sur l’analogie entre la légende chrétienne des Sept Dormants d’Ephèse, qui auraient survécu miraculeusement aux persécutions de l’empereur Décius, et celle des Dormants de la Caverne, témoins de la Vraie Religion, que rapporte le Coran.

 

Instituée par le célèbre et trouble Louis Massignon, cette cérémonie syncrétiste symbolise, pour de nombreux chrétiens d’aujourd’hui, « l’accueil » dû aux musulmans. Mais existe-t-il, en regard, un « accueil » du christianisme dans le monde islamique ? Non. Au cours des cinquante-six dernières années, alors que la présence musulmane n’a cessé de se renforcer en Europe, notamment sous ses formes les plus militantes ou extrémistes, le christianisme a presque partout été refoulé et abaissé en Orient.

 

A quelques kilomètres des Sept Saints, l’agglomération du Vieux Marché s’enorgueillit d’une magnifique église médiévale. Le clocher contient le bourdon de la cathédrale Saint-Philippe d’Alger, transféré lorsque celle-ci a été transformée en mosquée. La proximité avec le site massignonien est-elle fortuite ? Apparemment, il n’en est rien. Ceux-là même qui bénissent l’accueil de l’islam auraient donc offert l’asile, du même geste généreux, à ceux que l’islam bannissait. Battus, cocus et contents.

 

 

© Michel Gurfinkiel, 2010

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