Michel Gurfinkiel

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Michel Gurfinkiel

Onu/ Le retour des tyrans











Le vote de l’Assemblée générale des Nations Unies sur le rapport Goldstone révèle une nouvelle carte du monde. Où les régimes totalitaires l’emportent sans cesse sur les pays démocratiques.

 

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Le 10 novembre 1975, l’Assemblée général des Nations Unies adoptait la résolution 3379, selon laquelle le sionisme était une forme de racisme. Soixante-douze Etats avaient voté en faveur de ce texte : tous les pays arabes, tous les pays musulmans (y compris la Turquie, membre de l’Otan, et l’Iran, où régnait encore le shah), tous les pays communistes et la plupart des pays africains. Trente-cinq s’y étaient opposés : presque tous les pays occidentaux, quelques pays latino-américains, africains ou asiatiques. Trente-deux s’étaient abstenus : la Grèce, le Japon et divers pays latino-américains, africains et asiatiques.

 

Cas unique dans les annales de l’organisation, cette résolution allait être révoquée seize ans plus tard,  le 16 décembre 1991, par une autre résolution, portant le numéro 4686. Entre les deux scrutins, que s’était-il passé ? Deux événements. D’une part, l’effondrement de l’URSS et de son empire, entre novembre 1989 et août 1991. D’autre part, la première guerre d’Irak, en février 1991. L’Occident était doublement vainqueur : face au communisme et face aux dictatures du tiers monde. Et à l’Assemblée générale de l’Onu, une majorité occidentale et pro-occidentale s’était soudain substituée à la majorité marxiste et tiers-mondiste qui régnait jusque là.

 

Voici trois jours, le 5 novembre, l’Assemblée générale a entériné à nouveau un texte inique dirigé contre Israël : le rapport Goldstone, réalisé sous l’égide du Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies. Cette fois, cent quatorze pays ont voté en faveur de ce document et déféré ses conclusions au Conseil de sécurité des Nations Unies, avec l’intention explicite de mettre en place des sanctions internationales contre l’Etat juif : tous les pays arabes et musulmans, y compris, dans les Balkans, deux pays partiellement musulmans d’Europe, l’Albanie et la Bosnie ; presque tous les pays latino-américains, africains et asiatiques, y compris la Chine et l’Inde ; mais aussi un pays membre de l’Union européenne, l’Irlande.

 

Dix-sept pays seulement, outre Israël, ont voté contre, tous chrétiens : les Etats-Unis, les deux grands dominions du Canada et d’Australie, les Pays-Bas, l’Allemagne, l’Italie, la Pologne, la République tchèque, la Hongrie, la Slovaquie, quatre micro-Etats océaniens et un seul Etat latino-américain, Panama. Enfin, quarante-quatre pays se sont abstenus, ce qui revenait à favoriser l’adoption du rapport Goldstone : la moitié de l’Union européenne, y compris la France et la Grande-Bretagne, la Russie, le Japon et divers autres pays du Sud.

 

Ce retour de balancier n’a rien de mystérieux. Il ne fait que traduire le retour des régimes totalitaires.

 

Le totalitarisme communiste ? L’Occident n’a pas voulu ou su l’éradiquer après le tournant de 1989-1991. Il n’y a pas eu de Nuremberg du communisme, pas d’épuration (sauf quelques exceptions), pas d’ostracisme des anciens tyrans et de leurs affidés. Aujourd’hui, le totalitarisme communiste subsiste, tel quel, en Corée du Nord et à Cuba. Il est resté en place en Chine, sous la forme d’un national-socialisme han. Il a été restauré en Russie et en Biélorussie, sous la forme d’un national-socialisme slave, et en Asie centrale, sous celle d’un national-socialisme turcophone. Il a conquis une partie de l’Amérique latine, à travers les régimes nationalistes d’extrême gauche de Hugo Chavez au Venezuela et d’Evo Morales en Bolivie.

 

Le totalitarisme islamique ? L’Occident a eu deux occasions de lui porter un coup fatal : en 1991, lors de la première guerre du Golfe, et en 2001, après les attentats du 11 septembre. A deux reprises, dans des contextes et pour des motifs différents, il n’a pas voulu le faire. Résultat : l’islamisme a partout rebondi et s’est partout renforcé. Du Maghreb à l’Afghanistan, de la Turquie à l’Asie du Sud-Est, de la Libye à l’Iran.

 

Les deux totalitarismes ont conclu une alliance stratégique contre l’Occident : Poutine soutient Ahmadinejad, qui soutient Chavez, qui soutient Poutine. Cette alliance, à son tour, exerce une attraction irrésistible sur les Etats dysfonctionnels ou faillis, sur les pays où règne une animosité anti-européenne ou anti-américaine et, last but not least, sur les pays occidentaux gouvernés par la gauche ou l’extrême-gauche. En ce sens, le vote anti-israélien du 5 novembre est un révélateur. Les pays qui ont approuvé le rapport Goldstone correspondent, en gros, au nouveau camp totalitaire. Et ceux qui se sont abstenus sont ceux où l’esprit de capitulation est au moins aussi fort que l’esprit de résistance. Que la France de Nicolas Sarkozy en fasse partie mérite réflexion.

 

Les Etats-Unis de Barack Obama ont voté contre le rapport Goldstone. On peut espérer qu’ils feront usage de leur veto si le Conseil de sécurité vote, sur la foi de ce texte, des sanctions contre Israël. Mais cette attitude ne doit pas faire illusion. Obama, par la politique dite « de dialogue » qu’il a appliquée pendant les neuf premiers mois de son administration – qu’il s’agisse de ses adresses à l’islam, de sa passivité devant la Corée du Nord et l’Iran ou de sa capitulation complète devant la Russie en matière de missiles antimissiles -, a largement contribué au déclin géopolitique de l’Occident et symétriquement à la montée du camp néo-totalitaire. Le rapport Goldstone, lui-même, n’aurait jamais eu le retentissement qui est aujourd’hui le sien si les Etats-Unis n’avaient pas décidé, dans le cadre de cette politique, de rejoindre le Conseil des Droits de l’Homme des Nations Unies, bien que celui soit composé en majorité d’Etats où les droits de l’homme n’existent pas.

 

© Michel Gurfinkiel, 2009

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